De la charité

Beaucoup de chrétiens se donnent bonne conscience en s’engageant dans diverses actions humanitaires. Ils croient bien faire puisque Saint Paul a dit : « Maintenant donc demeurent foi, espérance et charité, mais la plus grande d’entre elles, c’est la charité » (1 Cor. 13, 13). Mais c’est oublier qu’il y a deux définitions de la charité, l’une profane (l’amour du prochain) et l’autre correspondant à la définition théologique. Précisons ce que nous entendons par là.
En relisant les Ecritures Saintes, on s’aperçoit qu’aimer c’est prolonger l’action divine. Ainsi dans tout le Nouveau Testament, l’amour du prochain apparaît indissociable de l’amour de Dieu. L’amour du prochain n’est pas une simple philanthropie. Il l’est par son modèle : l’amour même de Dieu. En attendant la parousie du Seigneur, la charité est l’exigence essentielle d’après laquelle les hommes seront jugés.
Des actions humanitaires sans référence à Dieu n’apportent aucun changement
Qu’en dit le Christ ? A la demande d’un pharisien qui veut savoir quel est le plus grand commandement, Jésus répond : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme et de tout ton esprit : voilà le plus grand et le premier commandement. Le second lui est semblable : Tu aimeras ton prochain comme toi-même. A ces deux commandements se rattache toute la Loi, ainsi que les Prophètes. » (Matt. 22, 36-40)
Ce n’est pas par hasard que Jésus a formulé deux réponses – et non une – à la question du pharisien. En effet, la première réponse correspond à la dimension verticale tandis que la seconde correspond à la dimension horizontale. Ce qui veut dire que, tant qu’on reste dans le domaine de l’amour du prochain, on occulte la dimension verticale.
Bien souvent, on oublie le premier et on ne retient que le second, qui se résume parfois à un appel à la charité, aux actions humanitaires. Ou, tout simplement, en faisant appel à changer son comportement personnel. C’est comme si on oubliait le Père en ne s’intéressant qu’au Fils.
Mais cela veut dire quoi, s’intéresser au Père ? Pour faire court, on pourrait dire qu’on découvre le Fils dans le Nouveau Testament, et le Père dans l’Ancien Testament. La grosse différence – qui est aussi une complémentarité – est que Dieu le Père s’adresse à un peuple tandis que Dieu le Fils s’adresse à chacun de nous pris isolément. La formule est un peu brutale mais c’est bien cela : le Nouveau Testament nous présente un modèle d’homme parfait et nous appelle à lui être semblable, en allant aussi loin que nous pouvons.
C’est très bien, mais pourquoi oublier l’Ancien Testament ? Parce que « s’adresser à un peuple », c’est faire de la politique. Or la politique, dans l’Eglise, c’est tabou… Prenons l’exemple de Jonas : il rencontre le roi de la ville de Ninive en lui demandant, à lui et à son peuple, de se repentir, autrement dit, pour employer un langage moderne, de changer de politique.
La charité n’est pas qu’un acte individuel, elle est aussi une action collective
Les objectifs d’une action collective de la charité ne manquent pas. Pour ne parler que de l’Europe, le refus de dénoncer le caractère létal de la mondialisation est criminel : elle ruine les paysans français dont un d’entre eux se suicide tous les deux jours. C’est tout le contraire de la charité.
A l’heure actuelle où le nouveau président des Etats-Unis, Trump, se moque de l’UE – qui, pourtant, est une œuvre américaine dès le début, contrairement à ce qu’on nous fait croire – et décide de conduire une politique extérieure dont le seul critère est le résultat financier – tout le contraire de la charité – il est temps que l’Europe se construise d’une manière autonome. Cela implique d’accepter le choix américain d’arrêter la guerre en Ukraine, ce qui est la seule action charitable, et de se rapprocher de la Russie au lieu de la traiter d’impérialiste. Même si l’on ne fait que comme Trump en ne regardant que le côté économique, cela ne présente que des avantages, par exemple le retour à un bas prix de l’énergie.
Réconcilions-nous avec la Russie !


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